Méridien de sang de Cormac McCarthy

Un gamin, quatorze ans, mène une vie d'expédients dans l'ouest américain du milieu du XIXe siècle. Une existence violente qui lui vaut d'être remarqué et coopté dans une bande d'irréguliers décidés à lutter pour arracher le Texas au Mexique... Une expédition de branquignoles, foireuse dès le départ.

La nuit venue une seule âme se leva par miracle d'entre les corps fraîchement tués et s'éloigna furtivement à la lueur de la lune. Le sol sur lequel il était resté tapi était trempé de sang et imprégné de l'urine des bêtes dont la vessie s'était vidée et il allait, souillé et pestilentiel, fétide rejeton de la femelle incarnée de la guerre.

Nouvelle errance puis emprisonnement jusqu'à ce qu'il soit récupéré par une bande de chasseurs d'apaches. Sa route ayant croisée celle de quelqu'uns de ces tueurs chevronnés, il intègre la bande sous les ordres du sanglant Glandon. Forte personnalité mais éclipsée par celle du Juge, à la fois beau parleur cultivé et tueur sadique. Il les suivra dans le mandat d'extermination qui leur a été confié par le gouverneur local.

Dans l'aube fumante la troupe qui chevauchait en loques et en sang avec ses ballots de pelleteries ressemblait moins à une troupe de vainqueurs qu'à l'arrière garde harassée d'une armée détruite reculant à travers les méridiens du chaos et de l'ancienne nuit, les chevaux trébuchant, les hommes vacillant dormant sur leur selle.

Le gamin les suivra dans cette première mission puis dans la série de déprédations sauvages, de trahisons et de fuites provoquées par l'amoralité de Glandon. Le tout émaillé par la verve du Juge ou ses actes déments.

Les Américains entrèrent dans le bourg de Carrizal deux jours plus tard dans l'après-midi, leurs chevaux parés des scalps fétides des Tiguas. Cette ville était pratiquement en ruine. Beaucoup de maisons étaient désertés et le pénitencier croulant retournait à l'argile avec laquelle il avait été construit et les habitants semblaient eux-même vidés de leur substance par d'anciennes terreurs. Ils regardaient d'un oeil sombre et solennel le passage de cette horde sanglante à travers les rues deleur ville. Ces cavaliers semblaient venir d'un monde légendaire et ils laissaient derrière eux une curieuse tache comme une image a posteriori sur la rétine et l'air qu'ils avaient troublé en était altéré et électrique.

Cormac McCarthy brosse ici le tableau d'un autre Far West, démythifié, ultra violent, dément, une autre image de la conquête de la frontière. Dérangeant et fascinant par sa galerie de personnages, malgré un style déstabilisant (et parfois lourd), Méridien de sang marque durablement.

L'avis de Nébal.

Comments

[Escrocgriffe]

J’aime beaucoup le style des extraits, très visuel !