La Cybériade de Stanilas Lem
- Et… combien furent ces malheureux ? interrogea Trurl d’une voix plus faible qu’à l’ordinaire.
- Combien, dis-tu ? Ma foi, il ne m’en souvient plus. Je sais seulement que nul jusqu’ici ne m’a pu satisfaire, et que le hurlement de terreur, que l’on pousse avant de dire adieu au monde et de choir en ce puits, dure de moins en moins longtemps ; il faut croire que le monceau de carcasses qui jonchent le gouffre s’élève de plus en plus haut… Toutefois, n’ayez crainte, il y aura de la place, et cela pour longtemps.
Avec La Cybériade, Stanilas Lem s’est essayé au conte philosophique, légèrement cynique. On dirait presque du Voltaire quelque part entre Zadig et Le monde comme il va. On suit les aventures de deux robots constructeurs, Trurl et Clapaucius, tantôt en concurrence ou saine émulation, d’autres fois œuvrant de concert.
« Délivre le roi ! » s’écrie Clapaucius.
Mais le monstre de rétorquer d’une voix parfaitement humaine : « Tu n’y songes point ! A mon tour de pactiser à présent.
- Qu’est-ce à dire ? As-tu perdu la tête ? Tu nous dois obéissance conformément à la matrice ! s’exclame Clapaucius courroucé, tandis que la foule demeure consternée.
- Et de quel droit, s’il vous plaît ? Vous pouvez vous la mettre où je pense, votre matrice ! C’est moi le grand monstre algorithmique et démocratique, à rétrocouplage, au regard sauvage, avec police, coulisses, hélice et calculatrice. »
Personnellement je n’ai pas accroché au langage employé, ni à l’univers baroque sans queue ni tête. Le ton est résolument satyrique et n’hésite pas à tacler l’URSS au passage mais le tout est trop déjanté pour que j’adhère. Je préfère largement l’humour de Robert Sheckley ou Fredric Brown.