Terreur de Dan Simmons
Dernier roman traduit en français, Terreur est le meilleur roman que j’ai pu lire de Dan Simmons (cela dit je n’ai lu que le cycle Hypérion/Endymion et L’échiquier du Mal).
Il s’essaye ici, avec succès, au roman d’aventure historique
auquel est mêlé un peu de fantastique et d’horreur.
Le récit conte les mésaventures de l’expédition Franklin, partie en 1845 à la recherche du passage du Nord Ouest dans le grand nord canadien. Expédition mal préparée, approvisionnée par des fournisseurs peu scrupuleux, sur laquelle les problèmes ne vont cesser de s’accumuler.
Piégé pendant plus de deux ans dans les glaces, on assiste à la lente mais inexorable détérioration des conditions de vies de la centaine de marins des HMS Erebus et Terror.
Au froid, à la nuit, à l’absence de gibier, aux maladies s’ajoute la présence d’une créature de cauchemar. Une espèce d’ours blanc gigantesque, diaboliquement rusé et vicieux.
Le monstre a-t-il un rapport avec la jeune indigène muette - recueillie suite à une bavure au cours d’une tempête qui a coûté la vie à son compagnon ?
Il n’en reste pas moins que la créature ne sera pas leur
pire ennemi, l’homme étant un loup pour l’homme.
La galerie de personnages présentée dans le roman est très
variée et riches. Quelques flashbacks permettent de mieux les comprendre et seul
un d’entre eux est dépeint sous un jour manichéen n’évoluant que très peu.
On s’attache rapidement à ce petit monde malgré toutes les erreurs qu’ils ne
cessent de cumuler au cours de leur calvaire.
L’ambiance et le contexte historique sont bien restitués
sans pour autant alourdir le récit, on s’y croirait. La touche fantastique est
relativement légère et extrêmement bien gérée.
Terreur se présente comme une catastrophe annoncée et se révèle au final très surprenant et magnifiquement construit. Un pavé qui demande du temps mais qui se dévore sur la fin.
L’immersion y est très facile, en le lisant au début j’ai eu
froid puis je me suis surpris à lorgner des pommes pour éviter le scorbut. Une
réussite sur tous les plans, un grand travail de documentation et d’érudition
qui se lit sans difficulté.
« La vie humaine est solitaire, misérable, dangereuse, animale et brève », avait-il déclaré. Plus brève encore, semble-t-il, pour ceux qui volent leurs camarades.
Ce semblant d’éloge funèbre avait rencontré un franc succès. Bien que les dix embarcations que les hommes tractaient depuis plus de deux mois fussent déjà dotées de noms, datant de l’époque où l’Erebus et le Terror naviguaient encore, les marins s’empressèrent de rebaptiser les trois cotres et les deux chaloupes auxquels ils consacraient la seconde partie de leurs journées – la plus pénible à leurs yeux, puisqu’elle les voyait fouler un terrain qu’ils avaient déjà couvert une fois. Ils s’appelaient désormais Solitaire, Misérable, Dangereuse, Animale et Brève.
Crozier avait souri à cette nouvelle. Elle signifiait que les hommes n’étaient pas gagnés par la faim et le désespoir au point de renoncer à l’humour noir typique des marins de Sa Majesté.