Infinités de Vandana Singh
Une des choses qu'il aime bien avec cette ville, c'est la façon dont elle brise toutes les règles. Delhi est un lieu de contradictions - elle transcende la thèse et l'antithère. Il y a vu à la fois les taudis des pauvres et les monstruosités opulentes des riches. Aux grands croisements, là où les riches attendent impatiemment dans leurs voitures climatisées que le passe au vert, il a vu des enfants maigres à faire peur courir d'une voiture à l'autre pour vendre des magazines sur papier glacé comme Vogue ou Cosmopolitan. Entre les buildings flambant neufs errent des troupeaux de vaches et de chiens ; les singes rhésus copulent avec enthousiasme dans les arbres entourant le Parlement.
Avec ce recueil de nouvelles tant de science-fiction que de fantastique, Vandana Singh évoque l'Inde : ses violences religieuses (notamment avec la magnifique nouvelle Infinités) mais aussi la place de la femme dans une société corsetée : tant la mère de famille étouffée par les conventions que la jeune fille promise à un mariage arrangée...
Ses mains fouillèrent la glèbe ; elle pencha le tête, ses cheveux retombèrent sur son visage en une masse trempée et emmêlée. Et une forêts de mains s'éleva de la boue, des mains d'argile, des mains aimantes qui l'attirèrent dans les profondeurs de la terre. Son corps sembla se liquéfier ; une onde la parcourut. Avant qu'elle se soit engloutie, avant qu'elle ait persu toute forme, elle leva la tête et se tourna vers la jeune fille qui l'observait sous la pluie. Puis il n'y eut plus rien hormis une boue informe, et la pluie qui la lissait en déferlant sur elle.
Des récits qui sonnent juste, réussi tant sur la forme que le fond, agréables à lire. Une visite de l'Inde originale et touchante, un très bon moment.