Atlas des continents brumeux d'Ihsan Oktay Anar

Ihsan Efendi le Long, prétend arpenter le monde en rêve, depuis sa demeure de Galata. Il profite de ses brèves périodes de veille pour relater ses explorations dans son Atlas des continents brumeux. Bunyamin, son fils, veille sur lui et s'occupe de tenir la maisonnée. Ihsan l'Arabe, le grand oncle de Bunyamin est quant à lui, le contraire du père du jeune homme : aventurier et explorateur, il ne semble craindre personne et suis ses propres lubies.

Ihsan l'Arabe qui s'était  arrêté pour assister à l'incident, remarqua un homme en train d'observer les morceaux de foie : Kubelik ! Cet homme, devenu végétarien depuis qu'il exerçait la chirurgie, témoignait un étrange intérêt pour ces abats. Mais le pauvre bougre sentit ses jambes se dérober sou lui quand une main de fer l'attrapa par le col. Ihsan l'Arabe ne prit pas même le temps de lui dire bonjour et de s'enquérir de sa santé : il déclara au pauvre boiteux, d'une voix de stentor, qu'il avait un compte à régler avec lui. Lorsque Kubelik s'aperçut qu'au lieu d'entrer dans les bicoques en ruine, dans les terrains et les maisons abandonnées, autant de lieux propices pour éventrer, égorger, broyer les testicules et crever des yeux, ils se dirigeaient vers le port, il fur rasséréné.

Entre ces deux influences opposées, Buyanim est déchiré, malgré un expérience onirique, il décidera toutefois de suivre un sapeur pour un siège hivernal des plus risqué... Commencera alors pour lui une étrange aventure qui le ramènera dans la capitale ottomane dans les pattes de la loge des mendiants et les griffes d'une organisation occulte puissante et impitoyable.

Ainsi mesura-t-il la force dont il disposait, sans ce soucier de mettre en péril la vie de ceux qu'il considérait comme les pièces d'un jeu d'échecs. Plus tard, grisé par la rage de savoir, il ourdit toutes sortes de complots pour faire jeter des innoncents en prison et s'informer ensuie de la manière dont ils avaient réagi. A ses yeux, la vie n'était qu'un jeu où il y avait beaucoup à apprendre et boucoup à s'amuser : le monde où chacun avait peur de vivre était vraiment le jouet le plus amusant.

Si dans l'absolu l'aventure de Bunyamin est assez courte, ce court roman est assez dense du fait de sa tendance à la digression. Chaque entrée en scène d'un nouveau protagoniste, généralement très haut en couleur que ce soit Alibaz le gamin des rues épris d'aventure ou Mange Porc le chef des mendiants, donne lieu à une aparté sur son histoire personnelle... Une tendance assez surprenante au début mais finalement convainquante car elle n'est pas gratuite, tous les destins évoqués ayant une furieuse tendance à se croiser.

Quelque douloureuses que pussent être les choses qu'il vivait, voyait et apprenait l'aventure était une manne pour le fils de l'homme. Le plus grand bonheur sur terre était de vivre l'aventure et de témoigner de ce monde.

Surprenant, amusant et dépaysant, l'Atlas des continents brumeux est un roman picaresque sympathique et malin. Un bon moment.