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Les lectures d'Efelle
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29 août 2011

Rouge gueule de bois de Léo Henry

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Le crépuscule était doux et mauve et rien ne laissait penser à cette heure, en ce lieu, que l'histoire était en marche, que les ennemis affûtaient leurs armes, que l'univers se convulsait, comme pris d'un mal de coeur soudain, et que Fredric Brow, écrivain de science-fiction et de romans noirs, couronné par le prix Edgar Allan Poe par une nuit glaciale de 1947, s'apprêtait à commettre son premier meurtre de sang-froid.

1965, Fredric Brown connaît une panne d'écriture, qui le frustre d'autant plus que sa femme s'est lancé dans sa biographie pensant l'aider à résoudre son problème. L'écrivain passe le temps en noyant ses soucis dans l'alcool avec constance. Tout change quand il croise un français, Roger Vadim, venu le rencontrer. Ce dernier ne le reconnais pas mais lui met en tête une idée formidable : le crime parfait ! Voila qui devrait lui permettre de résoudre son problème d'inspiration. Brown échafaude un plan diabolique et se lance dans son exécution. En route, il ne réalise pas immédiatement que le monde commence à prendre une étrange tournure....

L'image était tremblante, le son médiocre, et Fred crut d'abord assister à un reportage sur l'affinage du cottage cheese. Puis il comprit que ce qu'il voyait était un paysage, une grande étendue d'un gris luminescent sous un ciel d'un noir absolu. Il distingua enfin la silhouette, pataude, à la démarche d'ours en peluche. "C'est un jour triomphal", faisait la voix nasillarde, étouffée par les milliers de miles de vide qui séparaient le locuteur de son public, "une victoire de plus pour la démocratie et le libre-échange... Dans le cul, les communistes !" Et, dans les gerbes de poussières archaïques que soulevaient ses bottes, la marionnette agitait ses bras boudinés en signe de triomphe.

En plus de virer de plus en plus fou, l'univers semble se liguer contre Brown, son plan diabolique prend l'eau de partout... Tant par dépit que détresse, il se lance avec Vadim, qu'il a retrouvé dans un bar, à la recherche de l'épouse de ce dernier, l'aventurière cosmique Barbarella, traquée notamment par le FBI.

L'épopée des deux alcooliques devient de plus en plus déjantée tant du fait de la menace d'une attaque nucléaire communiste que par les rencontres de plus en plus improbables : Hells Angels cannibales, Petit Prince sous acide, communautés improbables mais dans l'air du temps, agent du FBI télépathe... et beaucoup de cocktails !

Ils quittèrent Yuma avant midi. Le soleil tapait dru sur les ruines et les cendres en volutes. ils pilotaient une Cadillac de la décennie précédente, longue comme un jour sans drogue, élégante comme un pont de brique. Ils traversaient ce qui restait du monde civilisé après les rafles barbares, silence complice de l'univers après les hurlements des suppliciés.

Road movie délirant, apocalyptique, jubilatoire et étonnament maîtrisé. Au final une épopée douce amère jouant efficacement avec les vies de Brown et Vadim. Un bon moment.

 

Les avis de : Le Pendu, Mes imaginaires.

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