Quinzinzinzili de Régis Messac
Encore une lecture dut à Nébal. Régis Messac (1893 – 1945) est un précurseur
français de la science fiction, marqué par la première guerre mondiale, il est
assez pessimiste quant à l’avenir.
Quinzinzinzili a été écrit en 1935 et décrit rapidement la
fin du monde suite à une seconde guerre mondiale apocalyptique :
l’humanité est rayée de la carte suite à une modification temporaire de la
composition de l’air.
Gérard Dumaurier est un dilettante cultivé en charge de
l’éducation des deux enfants d’un parvenu anglo-saxon. L’un des deux enfants
étant atteint de tuberculose, Dumaurier doit s’installer quelque temps en
altitude avec les enfants.
Quand la catastrophe se propage en France, ce petit monde
participait à une visite d’un ensemble de grotte avec un petit groupe
assimilable aux scouts.
Piégé sous terre, ils survivront à l’apocalypse. Quelques
temps plus tard, la surface redevient habitable et le monde s’offre aux
derniers hommes. Un adulte et une dizaine d’enfants de nationalités différentes
dont une fille.
Ma civilisation - l’ancienne, veux-je dire – j’en vivais,
j’en usais, j’en profitais sans la connaître. Je prenais le train, et je savais
trouver le guichet où il fallait aller pour prendre mon billet, mais c’est tout
ce que je savais. Je serais bien incapable de construire une locomotive, ni de
dire au juste comment elle fonctionne, ni même d’en conduire une, si par hasard
j’en retrouvais une en état de marche. Idem pour l’auto, quoique je sache
conduire, il est vrai ; mais je serais incapable d’effectuer la réparation
la plus élémentaire. Les hommes de mon temps poussaient des leviers et
tournaient des commutateurs, mais ne savaient rien de ce qu’il y avait au bout
des leviers ou derrière les commutateurs. Maintenant, toute la machinerie a
sauté en l’air. Anéanties, mes machines. Et l’homme de l’âge des machines est
tout ce qu’il y a de plus ignorant des machines. Est-ce moi qui pourrais
reconstituer la plus simple des mécaniques qui faisaient jadis marcher ma
civilisation ? Non, quoique j’ai su scander des vers de Virgile et traduit
Shakespeare en vers français…
Déprimé, catatonique, Dumaurier ne s’occupera pas des
enfants pendant un temps et ces derniers construiront alors leur propre
société, pétrie de superstitions et d’ignorance.
Déformant la prière latine du notre père, ils se créeront un
dieu : Quinzinzinzili (Qui es in coelis). Responsable de toute la magie du
monde jusqu’à la flamme jaillissant d’un briquet.
Désespéré et désabusé, Dumaurier sera le témoin cynique de
l’évolution de cette nouvelle société.
Lanroubin s’est redressé et pousse un long cri furieux. Un
cri de vainqueur qui résonne sous la grotte.
Il peut être fier, ce galopin à la crinière en torche. Ah
oui, c’est un exploit mémorable. Cette arme grossière et primitive, ce bloc de
quartz, je vois que ce sera l’ancêtre d’une longue série d’armes : haches,
massues, boomerangs… et puis les arcs, les flèches, et plus tard les
catapultes, et enfin les canons, les tanks, les bombes. Lanroubin vient de réinventer la guerre. Il ne lui a pas
fallu longtemps. L’âge d’or a été court.
C’est un génie, ce Lanroubin. Désormais l’influence de
Manibal est en déclin. La science a triomphé de la force.
Ah, ah, ah, ah !
Roman amer, acide et très efficace. Une excellente interrogation
sur la nature de notre civilisation et ses bases. Le récit est écrit à la manière d’un journal à moins qu’il
ne s’agisse d’un cahier remis à un fou dans sa cellule comme cela est insinué
au début du roman.
A lire !
Oh, et puis…
Qu’est-ce que ça peut me faire ?
M’en fous. Quinzinzinzili !
Quinzinzinzili !